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Dieu, 1er interview ce matin

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Seul avec Dieu ce matin, je l'ai laissé parler :
 ― Écoutez, écoutez, disait-il
en mon absence, les hommes m'ont oublié
je suis si vieux que mon cœur est en effroi
si froid qu'il ne pleure que sur moi.
Où êtes-vous, où étiez-vous
quand j'ai oublié de regarder le monde ?
Quand du fond de mon domaine je polissais l'éternité ?
Ève, où es-tu dans cette foire aux embrouilles ?
Et vous, où êtes-vous à écouter
les millénaristes, les prêcheurs, les prédicateurs ?
Où êtes-vous à écouter dans toutes les langues
les financiers, les technocrates
les enfants fous de l'apocalypse, parler de moi ?
J'ai maintenant l'humour si borgne que parfois j'en ris
et l'amour si complaisant que j'en  oublie
la racine du crime et les jambes de la haine.
Pardonnez, à m'être trop bien caché j'ai eu des absences
mais écoutez, écoutez-moi
mon cœur est en effroi
si froid qu'il pleure de ce que vous avez fait de moi.
J'ai maintenant peur des carottes, des topinambours
et de toutes les racines !
Vous m'avez baptisé père de vos racines
mais les racines sont en guerre
naguère les hommes étaient nus et sans racine.
Ève, qu'as-tu fait
pour que je cache mes larmes sous un cœur triste
que mon rire se dissimule sous des lunettes noires ?
Écoutez, écoutez-moi
je ne veux plus voir la course brisée de l'écureuil
dans les serres du faucon
ni les vrais cons se faire chasseurs !
Je ne veux plus voir
l'enfant des guerres jouer au soldat
ni le soldat jouer à la guerre !
Je suis vieux de millénaires
vieux d'années lumière qui ont trop fait big-bang.
Écoutez, écoutez-moi
j'ai froid de soleil et d'amour
le réel est une prison
qui es-tu mon fils ?

 ― Père, ai-je répondu
je suis fils du vent et de la pluie
l'enfant des espérances perdues
je parcours mes rêves avec des ailes de goélands
je veux être un homme nu et sans racine
pourquoi m'as-tu abandonné ?
Je suis un Cro-Magnon que l'Habilis pourchasse
une conscience que le crime poursuit
je suis l'œil caché dans le triangle des cœurs.
Aide-moi Père
fais que le couteau cesse d'amputer la conscience
fais que les langues de putes apprennent
 le silence, l'amour, la compassion, le respect !
Je veux retourner à la matrice première
de l'enfance des hommes
en ôter le goût du calcul
en chasser les faux-monnayeurs de l'amour
je veux recréer l'intelligence de l'utopie
marier l'enfant et l'avenir !
Je veux tout recommencer.

Ainsi dans mon sommeil,
Dieu parlait ce matin
ainsi, je lui répondais
avant que la nuit ne me réveille
c'était à l'heure de l'interview.

jms 28/02

 

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Qui es-tu ?

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Je suis comme mon cherche souris
j'écoute, hume, traque l'odeur des mots.
Le mot est le miroir fou des apparences
le reflet d'un choc qui a embouti mon âme.

"Rouge" dis-tu, mais le rouge n'existe pas.
Tu n'existes pas
tu es l'écho de ton nom, je t'écoute, te hume, te traque
Je ne vois que ton apparence, qu'es-tu ?
Qui es-tu ?

J'ai dit rouge parce que je te crois de vie et de sang
parce que je te crois de bois et de fer comme la blessure
mais tu n'habites que l'apparence, cet écho du mensonge
et je sais la distance entre l'image et cœur
mais le cœur des choses existe-t-il ?
Je perçois le rire des fleurs,
la douleur de la hache  
qui blesse
Le vent me fait mal
mais à qui parler de cela quand le siècle est un poison
quand les êtres ne meurent pas tous dans leur lit
quand les hommes crèvent de faim et de guerres ?

Est-il encore utile
de ne pas piétiner l'insecte, de ne pas cueillir les fleurs
de sauver la vie parce que tu sais le prix de la douleur
parce que tu sais le sacré ?

Pas besoin d'en connaître le nom
pour savoir que dans l'anonymat
chaque vie à la même importance qu'une étoile.

Je dis rouge comme le cœur des étoiles
je dis rouge comme les griffes de mon cherche souris
je dis rouge comme ma douleur quand je parle de l'espoir

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La vie de profil

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

La vie se traverse-t-elle de profil
comme un sentier de ciel
que les oiseaux parcourent d'Ouest en Est ?

Où vas-tu Enfant échevelée dans cette croisière
où le silence des cœurs enterre ses rêves ?

Je viens d'un pays où les ombres se croisent
les fêtes anciennes grincent dans l'ancien couloir des jours
mais rose devrait être le ciel quand l'avenir t'appelle.

Je te regarde, tu es là, dans ce monde peuplé de vie
où la distance n'est qu'apparence qui ne résout rien
Le monde reste à nos pieds, complexe et incertain
Tu viens d'une enfance irisée de chats et de tendresse
toi qui pars jouer au poker des jours
tu as l'espérance dans ton bagage
et l'envie de rebâtir le monde
Tu pars toutes tes cartes en mains.

Intrigué, je te regarde, comme un soleil avenir
je te regarde, je crois en toi
Blotti en fond de poche et empli du chant des âmes
le stylo est une arme qui nourrit les dessins
Il y a de la pensée dans l'encre
mais il faut voir plus loin que la couleur
pour en trouver le sens.

Tes quatorze ans chantent  le printemps
où vas-tu Enfant
dans cette croisière aux vents incertains ?

jms-24 février

 

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Un jour

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Un jour
Un jour comme celui-ci
un jour où tout est noir
Qui a tué les étoiles de la nuit
qui a tué l’espoir
qui a bâti ce passé
qui a construit ces murs de fatigue
qui nous a exilés du bonheur
en captifs de la société ?

Huit heures - midi
deux heures - six heures
Quelles sont ces digues
entre le temps à vivre
et le temps à passer ?

Faut-il être ivre
pour ne pas hurler ?
Jouons de la gomme à tristesse
Au cœur des bouteilles est un feu d’oubli
qui consume la fatigue des heures amères
Au cœur de Marie-Jeanne
naissent des souvenirs feutrés
Aux portes de la conscience est l’ivresse
cette brume où vivent les chimères
il faut dire que ce n’était pas un hasard
si le génie d’Aladin
habitait une Dame-Jeanne

En déstructurant la mémoire
cette poubelle à réalités flétries
naissent des vérités sélectionnées
naissent d’autres amours
Quand meurent les souvenirs du jour
meurent les cauchemars
Le rêve est une réalité
où la fête se blottit

Pour que vienne amour et plaisir
il suffit de vouloir
Le bonheur se tisse
aux lueurs de l’espoir
Chaque heure qui glisse
sans tendresse ni sourire
est une heure qu’on nous vole

Enfants expatriés
derrière le dernier rempart de notre liberté
dans le jardin de nos rêves
aux confins de la conscience
Faisons la grève
la grève à leurs exigences
la grève à leurs réalités
Sombrons aux clameurs de l’ivresse
inventons les couleurs
dessinons le bonheur

Aux chaleurs de l’alcool
il faut peindre la tendresse
jouer de l’arc-en-ciel dans les nuages

Et tant mieux
si le temps s’y prend les pattes
chacun y choisira son âge.

jms-1966
in Cheval fou et Chemins de pluie et d'étoiles

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Il y eut un autre temps

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Il y avait eu un autre temps
Une moissonneuse y battait la campagne
Et l'odeur du blé chantait aux fêtes laborieuses
Il était homme courbé par le labeur
Mais homme d'amitié
C'était avant que le fils et la vie ne migrent
Avant que le fusil des solitudes ne le livre au silence.

Papi s'en est allé sur la grand' place du village
Le soleil et des quolibets d'amis l'y attendaient
Tout autour, les bruits chevauchaient des pas d'enfants
Et quelques carrés de mots et de rires
Puis, le temps a passé
La quiétude des jeux d'enfants s'est déchirée
Papi est maintenant seul sur la place
Les oiseaux sont partis et les "espincheurs"
Embusqués derrière les volets, ne le regardent plus.

Papi est un anonyme
Un de la rumeur des invisibles
Un transparent
Un à qui nul ne parle vraiment
Les "comment ça va", tout le monde s'en fout
Ce ne sont que des rebonds de silence
Des ricochets d'indifférence.

Papi ne sort presque plus
Les amis sont partis et ont rangé leurs quolibets
Tout autour, les bruits ferment l'enfance et l'amitié
Sur la place, les enfants devenus grands font leurs deals
Seuls quelques carrés d'ombre se souviennent
Des fêtes laborieuses et des amitiés effacées.

Papi se souvient
Des enfants et des oiseaux, du bleu dans le ciel
De l'amour dans l'air, d'un monde de labeur et d'amitié
C'était avant que les hommes ne deviennent des ombres qui se croisent
C'était bien avant que la peur et le virtuel n'expulsent la vraie vie
C'était au temps d'avant les années solitude
Avant ce vent d'indifférence où personne n'a de place
Avant le silence des amitiés tangibles

Désormais, frontières du réel
entre un "j'aime" smileyet un "j'adore"heart
les transparents ont une terre d'illusion
Papi a des amis sur facebook.

jms /6/02/20

mail

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