Peut-on arrêter le temps ?

Aucune nuit n'est plus large que le rêve
Ma maison d’autre mer est restée in-accostée
Mes rêves encore y naviguent dans une eau de sel
Mes yeux gouttent comme une mémoire de source et de regards perdus
J’ai du sable et des fissures de pierres dans le flot escarpé d’une enfance qui s’enfonce
Je piétine une obscurité de décennies qui grésillent comme des branches de palmier
Au matin, mon âme se perd dans de petits jours où les boutons d’or sont en exil
Dans la cadence apatride du cœur, j’arpente l’aigre du destin
Je palpe le cri mort du vent dans l’oued, je ploie les rides tristes d’un regard dépoli
Dompteur de chauves souris et de rêves interdits, j’accoutume l’oubli
Mes rêves naviguent encore
Et si le sel se noie, je me souviens la règle sur les doigts et le cri de la craie
Encore je me souviens de la couleur des joies et du partage des rires
Avant qu'on ne déterre le verbe partir et le rouge du sang
J’aimais l’ombre et la tanière des mots
J’aimais le vent et les cyprès
Loin de ma maison d’autre mer
J’ai vu valser les chrysanthèmes
D’hier à aujourd’hui, j’ai vu courir la vie
Et ceux qui en partent comme l’on divorce d’avec le jour
Encore mes rêves naviguent entre la pluie et l’insomnie.
Près de ma maison d’autre mer
Le temps trahit l’enfance
Il n’y a pas de retour
L’ivresse des prières déclame la mort
Jusqu’à la fin, il me faudra fissurer la pierre
En extraire des graviers de mémoires
Courir, écrire, me taire, sur les moiteurs de l’aube
Courir, écrire, se taire
Ne rien oublier n’efface pas la frontière
Je marche sur des cadavres de rêves oblitérés
Les territoires de l’exil enfantent la nostalgie
Mes yeux gouttent comme une mémoire de source et de regards perdus.
JMS - Extrait de "Dieu, le silence et moi" - Éditions Chemins de Plume
Il y a abondance de chaleur
partout et tout autour
dans le jardin
dans ma tête, aux pieds des plantes
et dans les cieux il y a du feu
sur le sol, ça brûle ma plante des pieds.
Le soleil frappe aux vitres
la sieste dans l'ombre se blottit
comme la quiétude d'un ensommeillement
si profond que j'entends ronfler les moustiques
certains sont somnambules et mangent en dormant
cela m'affecte.
Mes chats siestent, affalés dans cet après-midi d'été
où la vie s'est arrêtée de courir.
Je regarde jouer les fourmis
le ciel qui les a faites si petites
leur offre l'étonnant arrondi de mon ombre.
Ce ciel, au-dessus de nos têtes
comme requête de prière
appelle l'eau et la fraîcheur.
Il fait abondance de chaleur.
jms