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Connaissez-vous mon ombre ?

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Connaissez-vous mon ombre,
ma discrète qui vit dans les dessous du jour,
ma timide qui pour moi remise sa part de lumière,
mon humble, ma ténébreuse, ma présente,
qu'un verbe haut piétine pour me mettre en lumière
alors même qu'elle est ma compagne la plus fidèle
et que sa robe a taille d'éternité ?

N'ignorez pas ma parfaite,
elle qui m'abrite dans son manteau de crépuscule,
mon indomptable morceau de nuit,
ma silencieuse qui, comme les chats,
dans la claire-voie du matin
vit à potron-minet,
m'ouvre la brume et le jour.

La voyez-vous
mon ombrageuse qui, à couvert,
peuple mes clairs-obscurs,
l'intime qui me suit jusqu'à mes draps,
qui connaît ma part d’ombre
et scrute mes secrets
jusqu'au profond de mes silences ?

L'entendez-vous cette clarté noire,
l'indomptable qui me poursuit
jusqu'aux jardins de la conscience,
la petite grisaille attachée à mes pas, à mon souffle,
qui partout me suit ?

Parfois, mon ombre, j'ai peur pour toi quand le soleil te frappe,
que deviendrai-je quand tu ne seras plus
toi qui me précèdes
jusqu'à ce que le temps m'efface ?
Un jour, je serai ton absent,
ne m'oublie pas.

JMS

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Délire : Le rêve d'où je viens

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

On n'est jamais tranquille chez soi. Pas plus tard que cette nuit, un personnage, un homme venu d'un autre monde, a pénétré mes rêves. Fait incompréhensible, cet individu, d'aspect parfaitement humain, s'est introduit dans ma réalité. Aucun onirisme dans cette inquiétante hallucination, ce trouble-sommeil est l'archétype des grands cauchemars des chasseurs d'aliens, tant rien ne le différencie du plus banal des mortels.

Il est là, mon falsificateur, ne doutant de rien alors qu'interloqué je le regarde, il s'est installé dans ma cuisine. Il range, éponge à la main il fait le ménage. Évidemment, j'en suis convaincu, c'est un intrus, il n'appartient ni à mon univers, ni à mon imagination. Je le sais, tout cela ne se peut pas ! Me voilà donc bien obligé de constater que je cauchemarde et je me demande comment j'ai pu créer la vision d'un être aussi parfait ! Avec ses deux jambes, ses yeux clairs et expressifs, il marche, sourit, parle, me parle, travaille, s'affaire sans que jamais je ne l'aie invité à entrer ni dans mon rêve ni dans ma réalité ! De surcroît il ment, je le sais puisqu'il prétend avoir été envoyé par ma pharmacienne pour m'aider, ce qui est impossible, elle ne sait pas que je suis bordélique ! Deviendrais-je fou ? Où ai-je été chercher ce personnage ? De quelle chimie ou alchimie céleste, de quel ciel, terre ou univers, moi qui ne bois pas d'absinthe, de quel abysse, me parvient ce mirage ?

Moi qui suis généralement raisonnable et qui ne suis pas né de la dernière pluie, moi qui me connais depuis tant de décennies, je le sais bien que les vues de l'esprit, réalités et chimères, sont si aléatoires que, parfois, je crains de n'être que l'écho d'une idée saugrenue, un immatériel, un virtuel qui n'existe pas vraiment !

Est-il possible que mon moi, mon surmoi, celui que tout le monde croit que je suis, et moi-même, se soient laissés berner ? Ne vivrais-je donc que dans mon imaginaire ? Dans cette autre réalité, serais-je un ami de l'intrus venu nettoyer ma cuisine, un ami de ce fouille-partout qui me reproche de ne pas avoir de webcam sur mon ordinateur ? La question se pose, si cet individu n'existe pas, moi, suis-je vraiment là ? Devrais-je me  pincer ? Devrais-je gifler le premier venu, écraser le nez de mon voisin, pour m'assurer, par leurs cris, qu'eux sont bien réels et vivants ? Et, faisant cela, devrais-je espérer qu'ils réagissent brutalement pour enfin être convaincu que nous partageons la même réalité ? Une furieuse envie de me réveiller, de tuer mon hallucination, de manger une tablette de chocolat, et de me rendormir, m'agite.

La situation est désarmante ! Et je me demande si mon Léo, mon chat est vraiment parti vers l'ailleurs, ou si, juste lassé d'exister, il n'a pas fermé l'étrangeté de son rêve pour disparaître ? Toutes ces questions en suspension me font mal, si mal que je me cherche, suis-je réel parmi le vivant, ou seulement un vers fou dans la tête d'un poète, un verbe qui court à la poursuite d'une phrase ?

L'absence de la permanence des êtres et des choses m'inquiète, finalement, je voudrais être un arbre sans crainte et sans tourment, qui regarde la mer du haut de la colline, et attend les oiseaux sans jamais se poser d'autres questions que de savoir si demain il pleuvra ou pas.

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Jardin de la folie

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Au jardin de la folie, le mot ne tire pas toujours à blanc. Il y a longtemps que je fraie avec le désespoir quand l'ignoble fait son marché chez les vendeurs de drapeaux et de ciel. Là où les voleurs d'ombre exposent leurs morts comme des ex-voto posés sur la misère des hommes. Là où  l’Histoire se masque à la noirceur des défaites quand se glorifie la victoire des nihilismes oublieux du plus rudimentaire des postulats de l’humanisme. Rien d'autre que le droit de l'autre à être pareil au mien, ne devrait être Marseillaise quand les consciences s'affrontent. Au jardin de la folie, là où bourreaux et victimes se confondent, j'ai mal jusqu'à l'envie de vivre. Alors me revient ce vieux vinyle compagnon de jeunesse où Ferré chante Aragon. Amis de l'Affiche Rouge, le savez vous, rien n'a changé à la douleur de ne pas savoir changer le monde. Encore certaines de ces phrases me parlent de vous, me hantent, comme l'irréductible douleur de vivre dans monde en quête de l'inatteignable espoir d'être frères. 

JMS

 

 

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Comme dit mon chat (page 8)

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

 

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Si tu savais

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Si tu savais
Si tu savais comme j'aime la vie
je ne suis pas triste
je vis d'humour et de rire
mais si tu savais
comme le monde me fait mal
Si tu savais l'inventaire de mes amours
et tout ce que je peux aimer
boire, embrasser d'un simple regard.
Si tu savais l'inventaire de mes craintes
le frisson de mes peurs
Si tu savais mon bonheur
j'ai un chat et des fleurs
un soleil posé sur la mer
et une fenêtre ouverte
Si tu savais…
Si parfois j'ai peur
c'est pour ceux qui resteront
habiter ce futur de pouvoir
de famine
de djihad et d'argent sans abeilles
sans rêves

JMS

in PLUS FRÈRE QUE FRÈRE

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J'ai rêvé être un arbre qui marche, un arbre qui danse

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

J'ai toujours rêvé d'arbres qui marchent,
Lourds d'un bois de mémoires bien trempées,
la peau griffée de cœurs gravés
et d'amours oubliées
et là,
 ce ne sont plus des chaînes mais des êtres acharnés
à oublier la scie qui blesse tue et couche,
ce ne sont plus les moignons dont on fait les sabots
qui piétinent l'humus et le labeur au côté des hommes
et qui déchiffrent la douleur des siècles,
non, là,
il n'y a rien de l'entrave des jours
seulement une idée
qui rêve
qui court
qui danse
dans la peau d'un arbre
et abreuve la vie.

Impro sur une illustration d'Étienne Roba  (trouvée sur Facebook)

JMS

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Je passe comme un chagrin de temps qui court

Publié le par Cheval fou (Sananès)

Je passe comme un chagrin de temps qui court

À ma mémoire algérienne
À Hossine, ce vieil ami que j’aimais comme un père

 

Retiens ma vie, m’avait dit ce chat griffé dans le cancer du vent
Tourne tourne le poignard bleu
J’ai laissé sa vie sur le cri désâmé d’une seringue assassine
J’ai oublié mes larmes sur la table d’un vétérinaire
Tourne tourne la lueur trouble de son dernier regard
Tourne tourne le poignard de l'impuissance
Partent les pages partent les larmes
Et moi qui passe comme un chagrin de temps qui court

Je suis un homme de demain, je serais un enfant d’hier
Résonne la Question
Est-il un mot plus signifiant que : Pourquoi ?

Retiens mon nom, avait-il dit sous un ciel d’ailleurs
Tourne tourne le poignard bleu
Dans l’enlisement des jours un vieil ami s’efface
Comme un deuil en partance et la mort entre nous
Au temps de l’enfance et du sang sur un trottoir d’adieu
La vérité cherchait ses mots et clamait des promesses
Dans les fausses notes d’un temps égorgeur
La prière et le crime rognaient le même verbe
Partent les pages partent les larmes
Tourne tourne la lueur trouble de son dernier regard
Tourne tourne le poignard de l’impuissance
Je pars comme un chagrin d’antan épuisé de remords

Sous le cri désâmé des minutes assassines
Quand tonne la question,  je suis un gamin d’hier
Est-il un mot plus insignifiant que : Toujours ?

Je vais comme un chagrin de vent mauvais
Je bruisse comme une rumeur d’oublis insoumis
L'enfance que je portais mijote un enfant chauve
Et Toi, quelle est Ta langue ? Ne parles-Tu que le silence ?
Je Te regarde sur la seconde qui part
Tu me flingues comme une marée de rire sur cœur à marée basse
Partent les pages partent les larmes
Tourne tourne le poignard de l’impuissance
Tourne tourne la lueur trouble des derniers regards
Je pars comme un éléphant fou
Quand la mort barytonne à la pointe du jour

Mère, où es-tu
Qui me laisses grandir vieillir m’assagir m’assoupir ?
Poucet qui égrène les jours
Je pars mes rêves à la main
Vieil enfant qui court dans la maison de l’Ogre
J’écoute tonner l’oxymore
Est-il un mot plus signifiant que : Jamais ?
Partent les pages partent les larmes
Jamais triomphe toujours de toujours
Tourne tourne le poignard de l’impuissance
Tourne tourne la lueur  trouble de nos regards
Et moi qui passe comme un chagrin de temps qui court

Le cheval d'enfance n’ira pas plus loin.

JMS - Extrait de "Dieu, le silence et moi" - Éditions Chemins de Plume

Publié dans Dieu le silence et moi

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J'ai voyagé

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

J’ai voyagé
J’ai voyagé, j’ai vu, j’ai rencontré. J’ai cru, cru me tromper, cru aimer, cru que le vrai avait une couleur, cru que le malheur, le bonheur, comme toutes choses, avaient leur couleur. Je ne savais pas les larmes de joie, les rires de douleur et le festin des pélicans. Je ne savais pas qu’il y a dedans et dehors, je croyais le bien et le mal partout pareils. Je croyais que le bonheur du maître et celui de l’esclave avait une même odeur. Je n’avais rien vu du dehors. Je croyais au blanc et au noir je ne savais rien du "ni blanc ni du noir". Je ne savais rien du gris.

À la décrue du croire, j’ai saigné du sel, frotté mes paupières, tué la nuit jusqu’au soleil. J’ai vu tout ce que l’on voit, j’ai perçu tout ce que l’on ne voit pas. Mon compagnon le plus fidèle fut ce rêve fou que l’on appelle délire. J’ai toujours habité un doigt dans l’ailleurs, à ronger des odeurs de voyage, de départ et de fuite. Fuite du toujours pareil, fuite du père, fuite de l’appareil, fuite de l’impératif, fuite du réveil, fuite du quotidien. Entre fuite et exploration, entre raison et déraison, entre cynisme et rêve, je cherche des frontières, je lance des SOS, j’appelle l’impossible.

Aussi loin que je regarde j’ai toujours aimé le vent du large, la mer qui divague, la peur du retour et le cri des crépuscules. J’ai toujours habité le plus près possible de moi, j’ai toujours eu la divagation à la porte de mes mots. J’ai toujours habité sur le fil, entre fuite et départ, parfois en voyage et souvent seul. Peu d’êtres ont partagé ma vocation à parcourir les ailleurs de la raison, très peu ont avec moi visité les satellites d’Andora et ces pays où les poules à 4 têtes marchent dans la direction de leur regard. Peu ont vu ces pays où les autruches à tête creuse entrent dans leur peur pour fuir le soleil et tombent dans des sommeils pailletés pour échapper à la vie. Très peu ont avec moi visité ces archipels du rêve où les baleines des sables vont à l’Est quand leur regard est à l’Est, vont au vent quand leur regard est au Levant. Peu d’entre nous ont vu aux portes de la conscience la chute des mésanges quand le doute fripe l’avenir. Peu ont visité le cri bleu du Zen où l’on voyage assis en tailleur, peu ont visité cette planète égarée où les hommes marchent sur la tête, où l’ombre fait moins peur que le savoir.

J’ai voyagé loin, j’ai voyagé en moi, cherché le point de fuite, trouvé la tangente, traversé l’horizon et la peur. J’ai déchiré le siècle, griffé le millénaire, mais encore je suis là. Mon rire est chauve, mes cheveux édentés, mon désir encore exigeant ne rêve plus que d’un œil. Je dérive entre espérance et contrainte, je ne dors jamais sur mes deux oreilles, je vais à ma rencontre je me cherche… je ne suis jamais où je veux.

Le voyage est si lent et l’avancée si peu à l’écoute des mots de hasard, que je n’ai pas toujours su entendre.

Un jour, la compagne anglaise d'un de mes compagnons de dérive, indignée de me voir manger de la viande, m'écrivit  dans son français maladroit : "Connaisses-tu* la peur de la bête, avec son cœur en papier froissé avant d’être dans ton assiette ?". Ce jour-là, j’ai mangé, fini mon steak avec un cœur en papier froissé, puis j’ai oublié.

Pourtant, ce jour-là, le ciel est devenu plus large. Ce jour-là, j'ai compris que certains hommes ne sont pas à la dimension de leur âme, qu’ils restent enfermés dans les vanités infantiles du paraître, dans le petit habit de leur condition humaine. Ce jour là, j’ai compris qu’il me faudrait encore cheminer pour apprendre que la douleur, la peur et le désir de vivre, n’appartiennent pas qu’aux hommes, que l’infini est peuplé d’une multitude complexe que nos regards estropiés ne savent pas toujours apercevoir. Ce jour-là, j’ai compris qu’il me faudrait grandir dans ces incernables de la conscience, que seules l’étendue et la profondeur du regard font la grandeur d’âme. Ce jour-là, j’ai compris qu’il me faudrait voir plus grand que l’apparence, plus loin que mon assiette, qu’il me faudrait creuser pour savoir ce que cache un sourire, et aussi savoir que, dans chaque larme, meurt un univers. Ce jour-là, j’ai compris qu’il me faudrait encore et encore passer la frontière de mes rêves pour peupler mes mots du cri des arbres et des caresses de mon chat. J'ai compris que pour grandir il me faudrait garder les langages de l’enfance et traverser l’amour et l’amitié comme on traverse l’horizon. Ce jour là, j’ai appris que ni la main ni l’œil ne vont jamais au fond des choses, que l’invisible est plus profond qu’il ne parait, que rien sauf la vie n’est à la dimension de l’amour.

Ce jour là, j’ai compris qu’il me faudrait encore traverser ces ailleurs où se cachent les grandes vérités, qu’il me faudrait encore et encore creuser et chercher pour être un jour à la mesure de mon âme.

J’ai voyagé loin, aussi loin que possible, mais la question reste immense, encore je dérive. J’ai beaucoup voyagé mais ai-je été assez loin pour habiter mon âme ?

JMS - In : "Derniers délires avant inventaire" -

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