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Les chiens avaient été lâchés

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Les hommes de foi, les hommes à drapeaux
et les chiens avaient été lâchés.
Un vieil enfant disait : "Ouvrez vos cœurs".

Je ne suis ni doctrine, ni religion
ni l'héritier de crimes que je n'ai pas commis
ni l'enfant Falacha
ni l'enfant Noir d'Amérique ou de Palestine
ni le Juif, ni l'Indien
ni le Ouigour ou le Yazid
je suis fils de la vie et de l'arc-en-ciel
et si j'erre encore sur cette Terre
laissez-moi être ce vieux républicain
cet affamé d'hier
cet adolescent en fête sur les barricades de l'utopie.

Si la balle me fait tomber,
quel que soit le jour, quelle que soit l'année,
je ne serai jamais qu'un enfant en peau d'homme.

Dites aux hommes de foi, aux hommes à drapeaux,
qu'il y avait en moi une maison de vie
des mémoires ancestrales
de vieux disparus sur des champs de guerre
des enfants partis guerroyer sur des chants de paix.

Dites aux chiens lâchés qu'il y avait en moi
des mémoires de tableaux noirs
des grincements de craie
des caresses de chats
une odeur de fleurs
et des terres sans barbelés.

Dites la flamme au cœur que portait ma mère
les vieilles douleurs de mon père
et une femme aux yeux doux
assise près de ses larmes.

Et, ne l'oubliez pas,
encore en moi un reste de pardon
et cet amour qui ouvrent le jour et l' à venir.

jms à paraitre

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Orage sec

Publié le par Ile Eniger

Cet article est reposté depuis une source devenue inaccessible.

Je cherche partout mais tout est nulle part. Je ne sais plus rien du ciel et de la terre. J'ai cessé d'écouter, interroger, espérer. Sentier sans balises, pierre oubliée, violon sans archet, orage sec, et les mots pour silence. Une nomade plantée au milieu du hasard, voilà ce que je suis. Un risque misérable bien lourd pour une vieille mule.

 

Ile Eniger - Les mains frêles (à paraître)

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Jean-Marc La Frenière : Respirer l'infini

Publié le par la freniere

Cet article est reposté depuis LaFreniere&poesie.

Le jour bouge et vacille comme l'ombre d'un arbre, le profil d'une vague. Les fleurs reconnaissent leur parentèle. Elles poussent en famille, les zinnias avec les zinnias, les tournesols avec les tournesols pour regarder le soleil. Les montagnes s'étendent toutes nues ou habillées de vert, dressant leurs mamelons rocheux. Le houblon s'enroule autour des bouleaux comme des cheveux de femme. Je vais, sentant le sec et puis l'humide, l'odeur des fleurs ou des plantes, le romarin, le basilic, le thym, le grand noir de la nuit ou l'air brûlant du jour. Mon cœur cogne et demande à sortir. Il toque contre la peau et les poumons se gonflent dans la cage thoracique. Tout est précieux, une brindille, un pétiole, une feuille. Tout est utile, un brin d'herbe, un grain de sable, un poil parmi d'autres. La terre n'en finit pas de marmonner comme une vieille édentée, murmurer dans les eaux, soupirer dans les grottes, le ciel d'éclairer même au milieu de la nuit. Mille questions nous taraudent. Toutes les réponses nous entourent, le jappement d'un chien, les pin-pon d'une ambulance, le rire d'un ruisseau, le ronflement d'un chat ou celui d'un moteur, le sifflement des balles, l'étonnement d'un enfant, les cris d'amour des musaraignes, la taille des objets, l'âme des arbres, celle des hommes. Il faut les déchiffrer, défricher les énigmes, déchirer les pans de mur, écorcer les écales du sens. Puisque le sommeil des choses est sans rêve et sans trêve, je veux saisir la vie avec ses pages trempées de boue, ses bouts de comédie humaine, ses brouillons, ses brouillards, ses bafouilles et ses mots, sentir l'odeur de l'immense,  respirer l'infini.  Depuis tout petit que je m'échine à grignoter les mots, le pain du jour tombé en miettes. J'écris comme une brouette chargée en trop, une soupe qui déborde, un petit-lait qui monte. Je voudrais que ce livre écrit sur rien se tienne par ses phrases, non pas leur style mais l'âme qui les habite.

Ce n'est jamais les choses que l'on voit, mais son regard sur les choses. Je ne suis pas doué pour la parlotte. Je défigure la parole. Pourtant, je tiens à la vie par les mots, le s du sperme, la barre sur les t, les points sur les i, les différents accents, le v du vol des oiseaux, l'électricité des choses, l'énergie de la terre, la décantation des roches, les mouvements de langue, les dés jetés, le déjeté des ballerines, la fraîcheur de l'eau, le e muet des gestes, la couleur des moissons, celle des peaux, la souplesse du cuir, l'initiale des noms, des minuscules aux majuscules, l'esperluette et les guillemets. Tous les hommes se valent, du pire au meilleur. Ce sont les conditions qui changent. Le temps passe. Les blés jaunissent. Les sentiments dégringolent du cœur et courent dans la vie. Chacun vieillit en suivant ses organes et sa chair, ses tripes et ses pensées. Enfer et ciel sont en nous, peu importe les religions ou les idéologies. Chaque jour apporte un jour. Chaque heure fait son temps. Chaque homme porte son poids. Il y a la vie. Il y a l'homme. Il y a la mort aussi. Pourquoi a-t-il fallu qu'on ajoute l'économie, cette engeance aussi sotte que la chose militaire? Alors qu'une bonne partie de la planète meurt de faim, on ne calcule pas le prix de chaque bombe, chaque sortie d'avion, chaque sous-marin, chaque soldat. Avec une minime partie de ces dépenses tout le monde pourrait manger, se loger, s'éduquer, s'amuser. Il faut souvent se détourner de l'homme pour apprécier la vie. Les verges d'or envahissent la campagne. J'écoute le bavardage des oiseaux et les grenouilles qui ricanent. Des papillons balaient leurs maisons d'herbes folles. Je ne suis pas un chercheur d'or. Je cherche l'homme encore debout. Je poursuis ma route, de la caresse nébuleuse des étoiles au baiser géologique des montagnes. Tout commence à partir d'une goutte, l'homme et la rivière, l'esprit et la matière, le ton et la manière, toute la faune et la flore à partir d'un arbre et le cri d'un grillon.

Jean-Marc La Frenière

 

http://lafreniere.over-blog.net/2020/07/respirer-l-infini.html

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Mes nuits ne me font plus peur

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

À l'euphorie des possibles 
J'aime savoir la mère et l’enfant 
sous l'arbre porte-destin et ses envies de fleurs 
Les nuits ne me font plus peur
J'aime voir le jour s’enraciner 
dans l'espoir de lendemains sans fin 
J'ai tant appris du siècle et de ses griffures 
qu'aujourd'hui mes nostalgie reculent devant le pas d'un enfant 
Je ne sais pas ce que devient l’attente
J'ai perdu le goût de la question
J'aime à la frontière de l’heure 
J'ai tant appris que demain n'existe pas sans bonheur
Je sais la traversée des dimensions
Les ronces de l'absence, le flou des crépuscules
je les ai si souvent côtoyés 
que même parti,
je creuserai le néant, l'espoir et le vent 
jusqu'à y rencontrer l’intelligence
le lilas et l’oiseau, et l'amour si loin qu’il soit 
je le sais aussi vaste que ces mots 
qui défilent cherchant le papier 
comme terre d'accueil emplissant le néant.
jms 20/09/2020
 
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Article publié depuis Overblog

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

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Le mouton noir

Publié le par Cheval fou (Sananès)

Quand j’étais mouton noir
je ne savais pas ma couleur
j’avais des rêves coursiers d’étoiles

Enfant du rêve
entre ciel et lune, mémoire et futur
je voyageais en peaux de lapins
je bondissais en sauts de gazelles
je parcourais ma vie
sans que jamais rien ne me heurte
j’avais tout mon temps
j’avais l’âge du cœur

Quelle heure était-il donc quand je chantais ?
Quand je courais ?
Au matin, le vent tombait
Et repliait des crépuscules éreintés
le jour frappait à la porte et le soleil me levait
j’habitais l’ailleurs

La plage s’est éloignée, j’ai traversé des mers
j’ai porté la larme, le kaki, le fusil
j’ai traversé l’hiver
La Marseillaise s’est épaissie
elle marche comme une mémoire trahie
mes mains sont froides
je n’ai plus froid aux yeux

Quelle heure était-il ?
Le bourdon se souvient
je survolais l’alternative, les cartes
la diagonale du fou
les guirlandes, les horizons adjacents de l’espoir
j’étais mouton noir
je débusquais l’intense, les coups de poing
les accroche-cœurs, les crocs-en-patte du destin
je narguais la ride et la pendule
je me parlais français, anglais, chinois
en rêve, j’interrogeais le vieux chef Seattle
qui n’avait voulu vendre
ni le ciel, ni sa terre
je pleurais Lorca, Anne Franck, Allende
j’habitais une bulle bleue aux lisières du réel
j’habitais en cœur intérieur
en rires et rimes intérimaires de l’espoir
au nord, il y avait les barbelés
le cynisme, l’hiver et l’orage
je rêvais sans frontières
j’habitais loin
quelle heure était-il ?

L’heure avance
mes mains plissent de vieilles joie
au calendrier des griffes émoussées
mon chat regarde les souris danser
quel jour sommes-nous donc ?

Un soir, la lune s’est couchée
l’abeille du désir a fait la mouche du coche
j’ai tissé ma laine, coupé du bois
plié le jour, courbé le rire, raboté l’arc-en-ciel
c’était un jour où la misère souriait
quelle heure était-ce donc
quand ma colère est tombée ?


À l’horizon, je croise des hommes cassés
et des avenirs d’enfants sans rêves
je déneige la mémoire, je dis oui, je dis non
je suis mouton blanc
je ne rêve plus
je me repose sous un ciel toujours gris
je tricote une toile de soie
 j’attends que le jour s’y prenne

Parfois entre la vie et le verbe
le bourdon se grise, me tient par la barbiche
je ne me raconte plus d’histoires
j’ai posé mon stylo
j’attends que la colère revienne.

 

JMS publié octobre 2010 in "Et leurs enfants pareils aux miens"

 

 

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