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Lettre à Martin Niemöller et à Mordekhaï Gebirtig

Publié le par Cheval fou (Sananes)

http://www.dailymotion.com/video/x2i08ix_catherine-ringer-soiree-david-krakauer-et-son-all-star-extrait_music


La clarinette de David Krakauer pleure
comme hurlerait un chien,
son os de vie planté en plein cœur.


«Ils brûlent brûlent notre bon village,
proie des flammes, proie de carnage… vent de haine …
C’est toute notre vie qui brûle»
*1

La voix de Catherine Ringer résonne
comme crépite le cri d’une femme
dévorée par d’atroces mémoires

Sa voix martèle et forge mes mots
le verbe compressé résonne
sur l’étendue d’un cri plus long que les décennies

Ailleurs et ici les hurlements mutilés
portent la plainte de peuples qu’on assassine
de femmes que l’on souille et d’enfants volés que l’on fait soldats

Ailleurs et ici sa chanson court comme un linceul blafard
posée sur l’agonie de l’Orient
sur des hommes esclaves et d’autres qu’on décapite

Dans un siècle qui rumine ses silences
la voix de Martin Niemöller*2
ne cesse d’embusquer son poème

Aux apothéoses de la mort
la haine n’est pas morte et les consciences incertaines
ferment les douleurs trop lointaines

Quand ils sont venus chercher les yazidis,
encore une fois, Martin
nous avons fermé les yeux

Quand ils sont venus chercher les chrétiens,
encore une fois, Martin
nous avons éteint nos cœurs

Quand ils s’en sont pris à nos enfants,
alors, nous avons tremblé

Tu vois, Martin,
L’Histoire ne nous apprend ri
en.

Les barbares sont à nos portes

——————————————-
*1Mordekhaï Gebirtig, poète auteur du poème : Ça brûle
*2Martin Niemöller, pasteur et poète au célèbre poème : Je n’ai rien dit,

 

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Amis, un jour je partirai

Publié le par Cheval fou (Sananes)

Amis, un jour je partirai dans le silence des mots inécoutés.
Je partirai avec tout ce que je n’ai pas fait, pas dit, pas écrit.
Je partirai comme une encre effacée.
Je m’en irai loin, loin de vous et des miens.
Parmi les enfants du néant.
Dans les immensités de l’in-savoir.
 
Amis, peut-être nous sommes-nous déjà rencontrés.
Dans un monde ailleurs.
Au profond des réalités incontournables.
Peut-être même avons-nous échangé quelques mots,
une phrase ou un poème en ce langage des cœurs
que nul n’enseigne alors même qu’il est indispensable.
 
Amis, peut-être avons-nous bousculé la raison.
Jeté des pavés dans la mare aux certitudes.
Peut-être avons-nous cartographié quelques-uns des hiéroglyphes du Mystère.
Peut-être même que du haut de nos cultures,
nous les avons brutalisés parce que pour les approcher,
il nous aurait fallu être nus de culture et de savoir.
Il nous aurait fallu les décrypter loin des bibles et des guides de savoir-vivre.
 
Il aurait fallu tant et si peu de choses pour que le regard soit autre.
Pour que l’autre soit un prochain.
Pour que l’indifférence n’obstrue plus le paradis.
Il aurait fallu refaire la matrice et désinventer le crime.
Il aurait fallu plus de rêves que de réalisme, plus d’amour que d’argent.
Vous le saviez amis, et pourtant, peut-être ne nous sommes-nous jamais rencontrés.
Où allez-vous, ou courez-vous amis ?
D’où venons-nous amis ?
Tant de temps que je vais ma route,
que je parcours l’agitation désespérée de milliards d’hommes
qui se cherchent à la parade dans une course effrénée aux images
sans jamais regarder en arrière, sans jamais voir en eux.
 
Si la vie n’était ce virtuel où les contraintes empêchent de vivre,
peut-être aurions-nous pu nous rencontrer amis.
Un jour, peut-être, nous rencontrerons-nous plus loin que nos états d’âme,
cabotant ou dérivant vers des continents de fraternité.
Peut-être traverserons-nous ensemble les fleuves de la vie et de la mort.
Peut-être partirai-je sans que nos vies se soient croisées.
Peut-être partirai-je sans avoir usé la Question.
 
Peut-être qu’à la traversée du siècle,
j’aurais dû cesser de chercher un sens au voyage et partir sans boussole,
 ne plus user mes mots et mes cris à pleurer sur l’abdication de la beauté.
Peut-être aurais-je dû comprendre que la sagesse est dans l’acceptation
et ne jamais croire que l’acceptation est un renoncement.
Peut-être aurais-du bâillonner les cris de ma conscience.
Ne plus arpenter le rêve et l’amour.
Ne plus vouloir en habiller ceux que j’aime.
 
À la croisée des jours, j’ai voyagé, tendu la main,
appelé, lancé des bouteilles aux étoiles, à la toile et aux quatre univers.
Peut-être me suis-je trop nourri de tendresses d'enfants.
Peut-être ai-je trop traversé la larme et le rire.
Peut-être ai-je trop oublié mes certitudes.

Amis, je vous ai cherchés en ce royaume de chair et de sang
où mon rire se noie dans la marée des jours perdus.
Si dans cet ici, Dieu n'a jamais occupé plus de place que mon chat,
ne Lui en tenez pas rigueur, peut-être aurait-Il pu être, aussi, mon ami.
Les êtres de l’absence ne portent-ils pas plus de rêves
que les cyniques terroirs du visible ?
 
Amis, quand viendra l'instant,
je partirai riche d'amour et plein de ceux qui ont donné sens à ma vie.
Je partirai dans le silence des mots inécoutés.
Du fond de ma vieille peau d'enfance froissée,
je suis prêt.

 

JMS - Clinique St George nov. 2012

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La laïcité expliquée aux enfants

Publié le par JMS

Réédition

"AU PAYS DES WAKIKINOUS"

 

SANANÈS Jean-Michel -

Livre15cmx15cm

Ci-après pages 2 et 3 regroupées pour présentation du texte

introduction-Wakikinous-001.jpg

Ci-après pages 12 et 13 regroupées pour présentation du texte

l-accident-001-001.jpg

 

Editions Chemins de Plume - Petite Collection Jeunesse

Version à couverture souple - Prix : 3,90 Euros

Version à couverture cartonnée - Prix : 4,90 Euros

Publié dans Livres jeunesse

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La radio crépite

Publié le par Cheval fou (Sananes)

La radio crépite
Il y a un cri de mémoire froissé
Mes certitudes sont ébréchées
Je suis déconcerté
Il y a quelque chose dans l'air
Une odeur
Un rien
Le grincement pathétique d'un phoque qui fait le beau sur ordonnance
Quand le public applaudit alors que la banquise est loin
Si loin que l'espoir en semble infiniment petit
Je le vois ce phoque à vie loupée
Je le vois de l’intérieur ce loup-foque qui me ressemble
Je le vois avec ce qu’il enferme de silence
Sa banquise est faite de non-dits qui grandissent plus vite que ses cris.
 
Ne vois-tu rien ?
Suis-je vraiment seul à sentir
Que la quiétude s'inquiète à se demander
A quoi pensent les silences
N’entends-tu rien ?
 
Sans haut-parleur et sans phares
Je m’appelle dans un miroir
Où se perdent les mille êtres que je voulais être
Mon nom n'est qu'un écho vide qui n'a pas de nom
Je suis une multitude d’autres où je n’habite plus
Je devrais nous convoquer 

Nous nous rencontrerions tous dans le cri blanc des âmes
Chacun parlerait de ses rêves et de ses peurs
De la vieille école de la rue Marceau
Où nous pensions avoir rendez-vous avec la vie.

Quelque part quelque chose d'effrayant court
Est-ce l'avenir ou le silence qui s'embusque ?
Ne vois-tu pas qu’il m'arrive d'avoir peur de la peur
Et même de l'inconscience du courage
Ne sais-tu pas
Que la vie se prend parfois les pieds dans l’escalier du doute ?
Ne sais-tu pas  
Que parfois on se prend à ne même plus vouloir être qui l'on voulait être ?
 
Pourtant, j'étais ici venu avec l'espérance d’un éclat de rire au soleil
Gai et pétillant comme une bulle de savon
Coincée dans le regard d’un écolier qui regarderait par la fenêtre
Quand l'addition est sur la table et sa liberté dehors
Faut-il jeter le stylo et l'encre, le cri et la parole ?
Parfois j'ai envie de dégainer, de crier, de marcher dans la pluie
De me vautrer dans le ciel, de cesser de ne pas rire.
 
Quand je me parle les mots s'insurgent
Ce matin, ils hurlaient :
Il faut déclarer que l'intelligence est morte le jour où est née l'envie
Il nous faut courir moins vite pour être quelque part

Mais la vitesse
Qui donc contrôle la vitesse ?
 
Les doigts coincés dans le calendrier
Je crie que le monde est fou
Et toi, mon enfant, ma fille, mon fils, prends garde à toi
Si tu ne le sais pas encore, tu es dans le collimateur de mon amour.

Qui es-Tu ?
Où es-Tu,  que je n’attends plus ?
Le monde tourne comme une toupie en vrille
La radio remonte un cri de mémoire froissé
Et des joies d’étrangleurs
Mes certitudes sont ébréchées
Le monde est en marche
Et il tourne sans Toi
Cache-Toi comme le soleil quand la lune rayonne
Cache-Toi comme mon chat quand il s'émeut
À voir les souris grignoter des rires d’enfants
Où es-Tu quand les pluies sont grises
Où es-Tu quand les enfants espèrent ?
 
Les enfants me poussent
Pourtant, j’ai caché ma dent sous l’oreiller
J’ai fait un vœu et des rêves de loukoum
J’ai regardé plus loin que les mirages
Je n’ai rien trouvé qui vole aussi haut que l’espoir
Il y a un quelque chose dans l’air
Une frayeur éveillée, un frisson
Les heures tournent
Cache-moi mon fils, cache-moi ma fille, j'ai peur
J'ai peur d'avoir encore envie de vivre
Encore mes vingt ans grincent
Comme le manque et le miel au désir de l’affamé.
 
Chaque soir éloigne tant d’avenirs
Que je pars loin de moi
Je suis hors de moi, on me croit ailleurs
Je suis allé si loin que je me suis perdu    
Je ne cours plus dans ma tête
Je vis sous un cheveu qui tombe
J’habite un cri qui martèle de lancinantes vérités
Qu'on se le dise, il y a péril à suivre ses rêves
Les grands rêves vont trop loin
J’arpente le naufrage, je n'ai plus de voile
Mon bateau prend l'eau de nulle part
Je dérive
Je cherche
Il y a ce quelque chose dans l'air
Cette odeur de bruit qui court comme un vieux qui part
Il y a ce rien de jeunesse qui ne trouve plus ses goguettes
Et ces quelques mots pathétiques qui grincent aux rires de la déraison.

 

JMS

Publié dans JMS - A paraître

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Ile Eniger

Publié le par Cheval fou (Sananes)

A ma fille

Regarde en arrière, il pleut des gens. Neige tremblée, mouchetée, tombée d'origines multiples. Mémoires anciennes donnant chair au présent, tu es leur sillage ma fille. Le passé n'est visible qu'au drapé du rideau qu'on soulève parfois. Dans cet avant de soi, les jeux, les histoires, les séductions, les ornements, tout se confond, se fond, chaque unique mêlé. Des murmures clapotent, il faut tendre la mémoire pour retrouver le fil. La langue est incertaine, la traduction aléatoire. Toujours les marionnettes courent pour échapper au bois mais leurs cendres transportent la force des vécus et tous travaux d’adductions d'autres. Jusqu'à toi mon enfant, ma puissante, leur mouture. Depuis les passages anciens figés, couturés, transformés, tu brèches l'élan de lumière crue, ton élan à vivre. Tu regardes et tu es. Tu construis chaque jour quelque chose qui regarde et qui est. De ce jour après jour, appuyée sur leurs traces, tu élances ta vie de racines solides. Tu te sais vivante dans ces métamorphoses qui gardent le noyau et démarquent ton être. Tu crées, tout au bout de leurs mains, cette nouvelle et unique flamboyance, la tienne. Et moi, ta mère, je suis de toute gratitude quand je te vois, présente.

Ile Eniger - Le raisin des ours - Éditions Chemins de Plume

Publié dans Ils disent

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Pardonnez-moi Seigneur

Publié le par Cheval fou (Sananes)

Pardonnez-moi Seigneur
si à cette heure vous vouliez
près de Vous me rappeler
Sur ma barbe encore me restent
quelques taches noires
comme des boutons de jeunesse
qui ne croiraient pas au couchant

Pardonnez–moi Seigneur
si à cette heure vous vouliez
près de Vous me rappeler
Même habitant en ce monde de méchants
encore me restent quelques rêves et utopies
un chat et des amours
que je ne sais solder

Pardonnez–moi Seigneur
si à cette heure Vous vouliez
que je sois Votre hôte
Moi, le vieux mécréant si attaché au vivant
de bien mauvaise compagnie je serais
moi qui encore me ressource
au regard d’un enfant qui joue
aux promesses des aubes claires
et à quelques chants d'oiseaux.

JMS

Publié dans JMS - A paraître

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