Arpenteur d'infini
Cours Cheval Fou
quand le jour ferme ses symphonies d'enfance
cours, cours à la mi-chien mi-loup
quand le rêve se fane à l'horizon de ce carré vide
qui ouvre des silences bavards
aussi profonds que la solitude
Cours
quand pareil à une clef de sol ayant perdu sa partition
tu te retrouves à la proue d'un navire de chair
en quête de destin
Cours
quand face à ta raison d'être
tu deviens arpenteur d'infini
et que tu ouvres la Question :
Où va le vent ?
Cours
quand au rétroviseur du jour
sans sextant ni boussole
tu te demandes sous quelle longitude
gît le Cap d'Espérance
où s'éteint ta vocation
à croire aux lendemains de l'homme
Cours
quand ton envie de te battre fait naufrage
et que vieille carne
à l'heure du foin et du paddock
tu te demandes encore
où va le sillage de mémoire qui mène jusqu'à toi
Ne trouveras-tu jamais le chemin ?
Te souviens-tu du funambule de l'aube
égaré aux contre-temps de l'heure ?
À l'envolée du jour, te souviens-tu
du cartable déchiré
et du goût du carré de chocolat sur la mie de pain ?
Raison, dis-moi
ne suis-je qu'une fraction de temps
que mon vivre dissout ?
Aux cocktails du vis et rêve
n'ai-je été que bouffées de joies égarées
aux ronds-de-jambes des mondanités
quand il eut fallu renverser la table
déchirer les cartes
gravir l'échelle de bois
et aller plus haut que le mensonge et l'espoir ?
Ne suis-je que celui qui caresse les étoiles
et va vers celui qui vient de partout
vers des millions de nulle part ?
Le verbe et la raison ne sont que ronds dans l'eau
à la recherche d'échos, que frontières d'ego.
L'in-savoir cherche sa source
cherche le certain et l'incertain
aux épousailles du jour
À la mi-jour mi-nuit
ne suis-je qu'un flocon de neige
trop loin de son Alaska ?
Un carré de vide
sur les prémices du Grand Oubli ?
Il n'y aura plus de galop
quand la musique me quittera
je me sens aussi las
qu'une symphonie sans oreilles.
L'horizon ferme un monde
qui ne me ressemble plus
Le miroir le sait
je ne suis qu'un vieux Cheval Fou
frémissant à l'insomnie d'un café.
JMS