Hommage à Léonard Cohen et à son dernier texte (You Want It Darker)

Publié le par CHEVAL FOU (Jean-Michel Sananès)

Fallait y aller compagnon
Tu pars à l'heure où le démon chasse
où le fusil pointe et le couteau tranche
la conscience est au coffre

Aucune chanson n'esquive la pointe des flèches
pas une berceuse pour apaiser la peine
les espérances sont closes

J'ai entendu ta voix
ton cri poussait ce siècle
nous avons tant usé de jours et d'illusions
que l'heure arrive
la nuit nous attend

Quand le temps viendra
vieux compagnon de mes années rêvées
vieil ami du cri de l'humain
et de ces mots habités dont tu faisais chansons
tu me diras, tu es là, tu es là

Et si maintenant près de toi, il en est Un
Un qui orchestre le paradoxe
il me faudra Lui dire que j'ai rêvé trop grand
trop rêvé l'amour, rêvé au lieu de croire
c'est ma grande faute

Et si je suis prêt moi aussi à dire
"Hinéni, hinéni" (me voici, me voici)
c'est que la route est noire
que mon pas hésite sur ce sentier de certitudes
qui ne trouve pas sa foi
que je suis trop loin de cette enfance
où le rire s'est éteint dans la noirceur des temps

Pourtant, vieux compagnon d'utopies
vieux compagnon à jamais Partisan clamant
Je n'ai pas peur
je suis là, moi aussi, prêt à Lui dire
Hinéni, hinéni (me voici, me voici)

Je te parle de cet automne
jonché de mots, de chansons orphelines
d'un pied sournois j'avance
j'arrive vieil ami
je sais cette clameur de mots qui t'habitait
je sais le poids des amours inoubliés
Je marche
je marche vers toi
peut-on choisir ses amis, ses morts ?

En cet hiver du verbe où tout s'efface
encore tu es là, tu es là
les années folk rongent leurs utopies
Marianne traverse le temps
je sais que la route d'un regard ne traverse pas l'oubli
je sais que le temps n'est pas nuage
j'aime encore la pluie
j'arrive
Hinéni, hinéni (me voici, me voici), disais-tu
ta voix reste
tu es là

La nuit nous attend
Faudra y aller compagnon.

 

Jean-Michel Sananès

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