La lune mourait, bousculée par de moutons vêtus de si épaisses toisons que, dans leurs errances célestes, sur leur passage, déjà ils avaient dévasté les étoiles et le firmament.
Au fracas du cosmos, entre un bing et un bang, un tintamarre phosphorescent qui, de la côte Ouest de la Grande Ourse jusqu'à la partie la plus septentrionale de la Galaxie des Songes, avait malmené mes insomnies.
La litanie des chiffres 22001-22002-22003, cessa… suffit l’inventaire des brouteurs de ciel ! Fini ! Je ne comptais plus les moutons, les laissant libres de partir à l'assaut des Trois Horizons, ignorant la lune mordorée qui, prenant ses quartiers, disparaissait, plongeant dans une profonde tristesse un océan qui, pour elle se mourait d'amour.
Pauvre océan qui, d'un bruissement de vague l'autre, lui disait : "Tu es si attirante que cela me fait marée". Mais, disant cela, il ne riait pas.
Il est vrai que nous étions à l'équinoxe et que l'océan lui-même, haussant les épaules, découvrait ses côtes, laissant apparaître le sable.
Et cela chahutait les marins qui devaient rester à quai cuver leur ivresse.
Ne comprenant rien à la douleur des poissons au soleil, moi je pleurais du rire imbécile de ceux qui, aux enterrements, attrapent toujours le fou rire.
Pourtant, l'heure où loge ma jeunesse s’éclipsait, tirée par les cheveux. Et oui, l'horloge s'agitait, laissant le vieux cheval galoper vers le Saut de l'Ange en ce bout de chemin qui mène à l’abîme, et dans lequel, un dernier matin, je pourrais bien m'abîmer !
Surfant sur l'incertain, après avoir lu trop livres sur la navigation en terres inconnues à bord d'un navire en carton, je me sentais piètre capitaine ! Et c'était bien cela qui me faisait peur ! Je n'ignorais rien de l'avenir promis à un escargot lâché dans un champ de coquelicots quand l'hiver rumine et que le ciel habillé de son blanc manteau, jette à terre sa peau de mouton après l'avoir pressurée jusqu'à la dernière larme.
Dans l'angoissante attente, certain d'être la Licorne oubliée sur le quai quand l'Arche de Noé lève l'ancre, j’errais triste dans les rues incertaines, comme mon chien lorsqu'il oublie l'espérance sous les griffes et les canines indociles du Doberman du voisin, un jour de colère.
En quel monde vit-on quand rêves et cauchemars sont en guerre et quand mes nuits sont si agitées ?
JMS - (Un jour d’équinoxe)